Comme nous le pressentons confusément, tout est relatif, tout est subjectif: nous percevons le monde et les autres à travers des filtres d'encodages qui nous sont propres, personnels et donc uniques. Toute notre histoire de vie se dit en notre corps, notre personnalité, nos forces et nos faiblesses. La psychologie nous propose d'en prendre conscience pour mieux nous adapter à notre réalité, pour mieux y faire face. Notre approche sera plutôt spirituelle: il s'agira d'aborder les difficultés de la vie à travers des repères qui nous permettent de faire apparaître une nouvelle conscience et de nouveaux projets d'existence.
Nous aborderons le sujet des blessures narcissiques à travers les typologies proposées par Lise Bourbeau.
(trouvées sur http://www.aquarienne.net/les-5-blessures.php)

Ces blessures de la prime enfance sont une réalité même si leur influence pourrait être débattue en détails; elles nous ont poussés à trouver des réponses et des parades qui ont évolué au fil du temps et des circonstances. Nous en gardons toutefois des traces plus ou moins conscientes, des mécanismes de protection et de défense. Ce sont des automatismes. 

Les étapes de la guérison :

  1.  Prendre conscience de sa blessure et de son "masque".
  2. Accepter sa souffrance comme sienne et ne plus accepter d'accuser les autres de sa propre souffrance.
  3. Se donner le droit d'avoir souffert et d'en avoir voulu aux autres (et ses parents). Comprendre les autres qui souffrent aussi et accusent les autres.
  4. Accepter d'avoir mal, de faire mal. Accepter le vie comme elle est. Ne plus avoir besoin de porter son masque pour se protéger. S'aimer.

La blessure de rejet fait adopter un comportement discret, effacé, secret, sage, renfermé, furtif… La personne apprécie évidemment la solitude et dispose de cette capacité à se rendre invisible. Pour sortir de ce trauma, elle va devoir apprendre à faire les choses pour soi-même, en tenant compte de besoins et de ressentis personnels, et non pour plaire aux autres ou pour qu’ils ne nous oublient pas.

Dans la blessure d'abandon, la personne joue le rôle de victime (en quête de soutien), elle en fait trop (pour se rendre indispensable) ou alors s’impose des responsabilités et veut en faire plus qu’elle ne devrait (en attente de compliments). La guérison passera par une solitude amadouée, par la découverte qu'on peut être bien sans devoir quémander / obtenir l'adhésion des autres...

La blessure d'humiliation conduit au masochisme: la personne trouve du plaisir à souffrir et elle cherche à revivre inconsciemment des situations dégradantes, abaissantes, vexantes. Elle évite ainsi qu’on les lui impose. Cette stratégie réduit la liberté, la confiance en soi et l'estime de soi. Elle se situe dans la comparaison permanente et dans l'obligation. Il va falloir lutter contre le besoin de plaire aux autres...

La blessure de trahison est liée à la souffrance de liens rompus qui génère l'angoisse de l'abandon. La personne craint cela, elle se montre méfiante, sceptique, autoritaire, sur ses gardes; elle peut même devenir agressive si ça ne va pas comme elle veut. Par ailleurs, elle se montre responsable, forte, physique, rapide. De plus, elle ne montre pas sa vulnérabilité et se confie peu. Pour garder le contrôle, elle se donne du mal pour tenir ses engagements quitte à user quelquefois de séduction ou d'un mensonge pour ne pas perdre la face ou ternir sa réputation. Quitte aussi à oublier ses propres besoins, elle peut chercher à montrer aux autres sa fiabilité et la confiance qu’on peut lui témoigner. Parmi les 5 blessures, le contrôlant est celui qui a le plus d’attente vis-à-vis des autres ! Pour en guérir, la personne va devoir arrêter d'être autant attachée aux résultats et à son plan, laisser la place à l'imprévu, aux obstacles, à de nouvelles possibilités. Elle devra apprendre à ne plus à vouloir être le centre de l’attention ni à convaincre à tout prix. Ainsi, elle pourra être mieux en phase avec ses émotions et mieux les gérer.
La blessure de l'injustice conduit à la rigidité. La personne ne ne se sent pas appréciée à sa juste valeur ne croit pas recevoir ce qu’elle mérite. Les autres sont injustes ! Elle pense quelquefois (à juste raison) qu’on l’apprécie plus pour ce qu’elle fait que pour ce qu’elle est. Elle adopte alors un comportement guidé par la perfection et la justesse, et par la volonté d'être reconnue. Pour en guérir, elle va devoir apprendre à être moins perfectionniste, accepter l'erreur ou la critique, oser montrer sa sensibilité sans peur du jugement !

 

Peut-on réellement passer de la grimace au sourire? L'effort volontariste est-il la panacée ? L'illusion pourrait bien être mensongère car en vérité les blessures de rejet, d'abandon, d'humiliation, de trahison ou d'injustice ont été le fait de personnes malveillantes et/ou maltraitantes qui comptaient pour nous ! Nous nous sommes construits tant bien que mal. En réalité, nous dira Françoise Dolto « Les humains ne perçoivent leur existence individuelle que par les entraves, les blessures et les mutilations qu'ils ressentent en leur corps et leur cœur. Ils "se fabriquent" par des émois contrés, quand celui qui les contre est aimé, respecté, désiré. C'est cette expérience, cet affrontement qui, au jour le jour, déterminent leur histoire personnelle. » 

Cela peut conduire au développement de faux moi : la personne adopte pour se protéger une attitude courtoise, soumise et pleinement adaptée aux normes en place. Elle peut aussi intellectualiser le réel en se coupant des émotions, des affects ou des actes créatifs. Certains faux moi seront introvertis, plutôt secrets ou rêveurs, d’autres seront extravertis et vont privilégier l’affirmation de soi, l’agressivité et la combativité. Nous produirons tous une forme de moi idéalisé. Toutefois, les exigences du moi idéalisé sont impossibles à satisfaire même si nous ne renonçons jamais à y parvenir. Être parfait ou se montrer toujours à la hauteur est impossible. Cela provoque des boucles de frustration, colère, ressentiment, d’anxiété et d’angoisse que nous parvenons à contrer en faisant porter la responsabilité de l’échec au monde extérieur, aux autres, à la vie ou encore à pas de chance. Mais tout cela va se traduire par des sentiments de culpabilité, d’échec, de frustration et de honte qui sont les signes les plus évidents des méfaits du moi idéalisé. Chercher à satisfaire ce tyran intérieur est sans fin et sans véritable épanouissement. Mieux vaut lâcher prise.

Rassembler ses esprits

Pour Thierry Tournebise, nos forces font sens dans la stabilité réelle, l’intégration de ce qui est vécu se produit grâce aux ressources internes, passées ou présentes, et grâce aux ressources externes présentes dans notre vie. 
Les ressources internes sont :  l'énergie physique, un passé relativement heureux, le fait d'avoir été apprécié par ses parents, d'avoir réussi des projets importants, d'avoir été entouré par des amis, etc. 

Les ressources externes sont : essentiellement la qualité de l'environnement humain, mais aussi d'avoir des projets, d'avoir un certain confort de vie... on peut en somme concilier en soi toutes les parties de soi qui nous habitent. Tous ceux que nous avons été fonctionnent alors ensemble, harmonieusement… de concert. On pourrait dire que la personne a ici la capacité de ne pas être éparpillée. Elle a « rassemblé ses esprits » et constitue un ensemble cohérent et stable. Seule l'authenticité pour nous y aider vraiment: être vrai, être soi, être dans l'instant, en interaction avec l'environnement et les autres.
Nous aurons ainsi à :

Combattre la négativité, c'est reconnaître qu'elle vit en nous et autour de nous, c'est donc accepter d'être vulnérable et vulnéré, envahi, touché ou débordé par cette négativité envahissante et aliénante. C'est aussi bien évidemment en sortir: en nous efforçant de voir le bien et le beau en soi et en l'autre comme dans le moment présent. C'est le réclamer, l'offrir librement. Jésus Christ nous y invitait à travers cette question anodine:

Que faites-vous d'extraordinaire, demande Jésus à ses disciples (Mt 5,47)?
Dans ce texte d'Évangile, Matthieu entend mettre l'accent non pas tant sur le caractère désintéressé que devrait avoir tout Amour, mais plutôt sur une attitude surprenante destinée à rompre les comportements habituels de clans ou de classes. L'extra-ordinaire consiste à nous replacer dans cette vie suffisamment bonne, d’y inviter y compris l'ennemi, un frère ou un parfait inconnu. Il y a donc un bénéficiaire à qui est destiné un message, une invitation – ou une incitation traduite en acte, en geste ou en parole -, à sortir des sentiers battu:

  • c'est croire quand tout le monde doute ;
  • c'est être de bonne humeur quand tout est ennuyeux et difficile ;
  • c'est être souriant, gai et poli quand tout le monde est grognon ;
  • c'est voir le beau malgré le médiocre et le laid ;
  • c'est aimer dans un milieu hostile ;
  • c'est vibrer dans un milieu amorphe ;
  • c'est servir d'appui au lieu de chercher à s'appuyer ;
  • c'est consoler au lieu de se prendre en pitié ;
  • c'est espérer quand tous se découragent, etc.

Ici, notre Esprit en action rempli d'Amour conteste et transgresse l'absurde en choisissant en quelque sorte l’envers du décor, ce qui paraît impensable ou impossible.

Cette pro-vocation non-violente - en tant que vocation pour l'amour fraternel - requiert une attention indubitable à l'Instant, à ce qui se passe ou se présente, doublée d'une pédagogie adaptée aux circonstances comme au receveur potentiel. Elle est une transgression volontaire, un saut qualitatif, un performatif par lequel sont dépassés nos addictions, nos douleurs pour que puisse advenir un nouveau futur, de nouvelles possibilités.

C'est toujours un saut dans la nouveauté, dans ce qui se présente, un possible parmi les possibles. Ce consentement a lieu si nos forces le permettent sans obligation extérieure ou intérieure. Ici,  vivre c'est aimer, c'est engendrer, susciter, éveiller, réveiller. C'est le contraire de vivre en circuit fermé, de posséder pour soi: richesse, savoir, pouvoir (F. Dolto). Ici, vivre c'est quitter le mortifère, celui dont Maurice Bellet dénonçait:

« L’impuissance ou le refus à vraiment naître, la contre-naissance qui est, pour qui l’éprouve, condamnation de son existence même.
La violence, qui fait de lautre un esclave, une chose ; l’amour y est, en vérité, haine, et même plus bas ; mépris.
La solitude, lenfermement en soi-même, et dabord par le corps même : nul autre à aimer.
Lenfermement dans le semblable, leffet de miroir qui stérilise la relation.
Le règne des fantasmes, de limaginaire qui réduit lautre à ce qu’on y projette.
La violence qui sexerce par largent.
La tromperie, la trahison, labandon.
La stérilité. On peut y être jeté, on peut le faire subir à l’autre. »
Des malveillances, méchancetés, maltraitances, violences identifiées, débusquées et démasquées pour ce qu'elles sont: du non-amour. Nous avons réellement le choix de ne pas obéir au Néant, au chacun pour soi, etc.